
Nous venons d’apprendre la disparition d’Anne-Marie Lhérisson épouse Straboni. Elle était âgée de 91 ans.
Anne Marie était l’épouse de Philippe Straboni, fils de Ange David Straboni, dont la maison de famille est située au pied de la montée du Casone.
Née en Haïti, elle était la Fille d’un professeur de médecine de Port-au-Prince. En 1954, âgée de 20 ans, elle allait quitter son île pour la faculté de médecine de Marseille où elle fit ses études.
L’arrivée de François Duvalier au pouvoir quelques années plus tard, alors que le père d’Anne-Marie était ministre de la santé, devait bouleverser la vie de la jeune étudiante. Sa famille s’exila aux Etats Unis et Anne-Marie ne repartit plus vivre en Haïti.
Elle se maria avec un jeune Corse, Philippe Straboni de Pietra di Verde, qui lui fit connaître son village.
Même si rien ne peut compenser la perte des lieux de son enfance où sont gravées « les années les plus douces d’une vie », Anne Marie fut de suite conquise par la Corse qui lui rappelait « un peu de chez elle » et par le village de son mari qui accueillit avec bonheur et curiosité, ce jeune médecin femme, une singularité pour l’époque.
Et lorsque la famille venait séjourner au village, Anne Marie avait pris l’habitude d’emporter avec elle sa trousse médicale et de délivrer des consultations à ceux qui venaient la solliciter…
Une femme qui par sa profession, mais aussi certainement par son éducation apparaissait comme une femme émancipée, suscitant une certaine admiration à une époque où dans les villages de la Corse profonde, nombre de femmes auraient hésité à entrer dans un bar pour y rejoindre leur mari disait-on.
Très vite adoptée par Pietra, Anne Marie y noua de solides amitiés. On peut dire qu’elle marquera d’une certaine manière le village de son empreinte.
En cette triste circonstance, les plus anciens de Pietra se remémorent le souvenir de Philippe, disparu il y a dix ans.
Au nom de la communauté villageoise, Monsieur Jean-Baptiste Santelli, maire de Pietra di Verde adresse ses condoléances aux enfants de la défunte, Laurent et David et à leurs familles, ainsi qu’aux parents et à tous ceux touchés par ce deuil.
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Ci-après, le texte très émouvant publié sur la page Facebook de Laurent.
Anne Marie Lherisson-Straboni s’est éteinte le 14 juillet 2025 à Paris, à l’âge de 91 ans.
Médecin pendant plus de cinquante ans, à la Destrousse (13), elle a soigné des milliers de familles avec exigence, bienveillance et foi.
Fille du professeur Camille Lhérisson, fondateur de la faculté de médecine de Port-au-Prince, elle portait avec force l’héritage d’une lignée de médecins dévoués. Elle avait découvert la médecine avec lui en parcourant la campagne haïtienne pour soigner les paysans haïtiens isolés.
Arrivée en France en 1954 pour y commencer ses études de médecine, elle n’a jamais retrouvé sa famille à Port-au-Prince, quittée à l’âge de 20 ans.
Elle ya laissé une part de son âme.
Après la prise de pouvoir des dictateurs François Duvalier, Papa Doc, puis de son fils Baby Doc, sa famille avait été forcée à l’exil aux USA. La violence de l’histoire, la dispersion de ses parents, amis, frères et sœurs n’ont jamais entamé sa détermination ni sa foi profonde.
Elle avait commencé sa carrière en faisant de la recherche au centre anticancéreux de Marseille et s’était ensuite installée à La Destrousse où elle a exercé son métier avec un engagement total pendant plus de quarante ans. Elle n’économisait pas ses forces lorsqu’il s’agissait d’aider son pays d’origine grâce au travail de l’association « Hispaniola » qu’elle avait créé et qui récoltait des dons pour scolariser chaque année une cinqquantaine d’enfants démunis.
Lors du séisme qui a rasé la ville de Port au Prince en 2010, elle avait accompagné la sécurité civile française pour soigner les blessés. Malgré son âge, elle avait alors dû exercer une médecine de catastrophe qui l’avait beaucoup marquée, dormant à même le sol et soignant nuit et jour la population victime de blessures terribles.
Après sa retraite en 2018, elle s’était installée à Aix en Provence où elle a profité de ses amis et de ses sorties, passionnée de jazz et de musique. Elle jouait elle même de l’orgue Hammond, comme une certaine Nina Simone qu’elle adorait.
Depuis 10 ans, la maladie d’Alzheimer l’avait peu à peu affaiblie. Mais ce que la maladie efface, l’amour et la mémoire le gardent intact.
Sans la dignité qu’elle chérissait, il était juste qu’elle parte.
Il reste sa sœur Maryse Fils-Aime à New York, ses neveux et nièces, ses fils David et Laurent Straboni, ses cousins et cousines dispersés entre la France, les États-Unis et Haïti.
« Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort. »
— Jean 11:25
Qu’elle repose en paix.
Laurent Straboni
Tél. : 06 07 73 96 21