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Festa in paese

Affluence record sur la place de l’église en cette douce nuit du 9 août.

Dès 21 heures, les premières tables commencent à se remplir et tandis que les tangos, pasos et autres valses, mettent en ce début de soirée une ambiance rétro et certainement un brin de nostalgie au cœur des plus anciens, très vite, signes d’un indiscutable succès, la friteuse « tourne » à plein régime et les plateaux de grillades se trouvent complètement saturés…

Et alors que Dume, grand animateur de la soirée, enchaîne sur des mambos, cha-cha-cha et autres madisons, afin d’assurer la transition vers des musiques plus actuelles, partie d’on ne sait où, l’annonce de « l’égalisation » parcourt la fête dans tous les sens, à la vitesse des rayons laser qui n’arrêtent pas de lézarder la piste de danse. « Bastia a égalisé !!! »

Une vingtaine de minutes plus tard, à Furiani, l’arbitre siffle la fin de la rencontre, libérant sans le savoir des vagues successives de supporters qui viennent occuper les dernières places assises, à moins qu’ils ne préfèrent aller directement au bar de la fête, pour commenter les exploits de leurs joueurs.

La fête bat maintenant son plein, il est plus de 23 heures, on est passé à une musique plus rock, plus ok, plus bath, plus in… avec des danseurs plus avertis, qui évoluent dans des nuages de brouillards artificiels, transpercés par des spots qui rythment une musique de plus en plus enivrante.

Une vraiment belle soirée qui s’est terminée au petit matin avec les derniers fêtards, fatigués mais ravis…Un grand coup de chapeau au Président du Comité des fêtes Jean-Etienne et à toute son équipe qui une fois encore ont accompli un sans-faute.

A la fin de la procession conduite en fin d’après-midi par le père Vincent, c’est Pierre Savignoni qui de sa magnifique voix de Baryton-Martin, devait exécuter le Dio vi salvi Regina, annonçant la fin des cérémonies religieuses qui ont eu lieu en l’honneur de Saint Augustin.

Rituel religieux pour certains, simple fonction festive pour d’autres, personne n’a pu rester insensible devant ce cortège d’hommes et de femmes qui célèbrent chaque année une tradition séculaire, en défilant derrière la statue représentant le Saint Patron du village.

Couverts par a ciccona, ils égrènent tout au long de la cérémonie des prières, entrecoupées de chants laudatifs, en particulier le combien populaire « Chez nous soyez Reine », perpétuant de la sorte, la dévotion de la Corse à la Vierge Marie, en même temps que le souvenir profond du temps passé. Sur la place de l’église, attend une boutique qui vend des objets religieux venus de Naples, chapelets, statuettes, médailles, au style désuet, voire même carrément kitsch pour certains, mais qui créent une ambiance particulière en cette fin d’après-midi du mois d’août. Et puis, ce sera la convivialité, toute simple, faite d’échanges et de communion entre tous. Muscats, vins blancs, vins rosés pour les boissons, fritelle, panzarotti di San Ghjise, frappe, torte, pour les « salés sucrés », furent à l’honneur jusque tard dans la soirée, avec un dernier petit groupe qui aurait voulu que cette soirée ne s’arrête jamais et qui continuera longtemps à la vivre, dans un coin de la place à peine éclairée…

Le 28 août le village fêtera son Saint Patron. Les plus anciens se souviennent certainement des « baracche » aux toits de fougère qui ce jour-là ceinturaient la place de l’église, des artisans et des marchands qui arrivaient tôt le matin de tous les coins de la Castagniccia, souvent à dos d’âne ou de mulet, pour venir vendre leurs outils, leurs couteaux, leurs pipes, leurs vêtements dits aujourd’hui « traditionnels » et toutes sortes d’objets utilitaires, que l’on découvrait à cette occasion.

L’après-midi, des animations avaient lieu pour les enfants dans la chapelle Santa Croce. Chansonnettes, scénettes et jeux se succédaient, parfaitement organisés par les dames patronnesses d’alors.

Puis la messe et le soir un grand bal qui clôturait cette journée de fête…

En évoquant ce passé, une question vient inévitablement à l’esprit. Pourquoi Saint Augustin a-t-il été choisi comme Saint Patron du village ? 

St Augustin avec sa mère Ste Monique

Qu’est-ce qui a déterminé nos ancêtres, à mettre le village sous la protection de ce berbère natif de l’Algérie d’avant l’islamisation, qui vécut entre le 4^e et 5^e siècle de notre ère et qui, après une vie quelque peu dissolue lorsqu’il était étudiant à Carthage en Tunisie, deviendra l’un des plus grands docteurs de l’église catholique ?

Difficile à dire, mais peut-être que justement nos anciens furent sensibles au parcours contrasté de ce Saint.

Ce n’est qu’à l’âge de 32 ans, qu’Augustin se convertira au christianisme après un passage par le manichéisme. A une vision binaire du bien et du mal, il substituera celle d’une éternelle confrontation entre ces valeurs, le bien finissant toujours par l’emporter sur le mal, avec pour preuve la résurrection du Christ.

Augustin mettra également l’accent sur la raison « entendue comme un moyen de s’approcher de la vérité des choses, la vérité absolue n’étant pas de ce monde» 

St Augustin évêque d’Hippone (ancienne ville de Bône actuellement Annaba)en Algérie

Le théologien insistera aussi sur la transcendance divine : les pensées de Dieu ne sont pas, de près ou de loin, les pensées des hommes.

Quelles qu’en soient les raisons, la présence de St Augustin comme St Patron du village nous interpelle. Sa pensée est terriblement actuelle.

Rejeter le manichéisme qui donne au bien et au mal une égale valeur, adopter la raison comme moyen de s’approcher de la vérité qui est le fruit d’une éternelle réflexion, accepter la transcendance comme preuve d’une certaine humilité de la pensée.

Ceux de nos ancêtres qui ont fait le choix de St Augustin n’étaient pas nécessairement des visionnaires. Ils avaient seulement une profonde connaissance de l’être humain, qu’il soit de Pietra ou d’ailleurs.