Nice 1946, ce sera l’année de la fin d’un long et douloureux périple pour l’enfant de 12 ans qu’il fut, victime de la folie meurtrière des hommes qui déferla sur l’Europe en cette première partie du 20e siècle.

Figure marquante de notre village, tout le monde connait Georges Petroff.

Mais combien d’entre nous savent qu’elle a été la singulière histoire de cet homme courtois et distingué, portant beau, qui a accepté, un peu à contre cœur, de répondre à nos questions sur sa vie, n’étant pas à l’évidence homme à se livrer aisément.

Georges Petroff est né en Lettonie en 1934 à Riga, où ses parents s’étaient réfugiés, ayant fui la Russie bolchevique. Son père y possédait une tannerie spécialisée dans la transformation du cuir.

1944 sera un nouvel exode pour la famille Petroff, lorsque les troupes soviétiques envahirent leur pays d’accueil et qu’ils durent, abandonnant tous leurs biens, rejoindre des camps de réfugiés près de Buchenwald.

1945 sera l’année de la libération par les troupes américaines puis le départ pour la France et pour Nice en 1946, où résidaient les Kissilewski auxquels la famille était apparentée par sa mère.

Aucune rancune, aucun ressentiment, le jeune Petroff tourne très vite la page d’un début de vie calamiteux qu’il veut très vite oublier. A 15 ans le jeune Georges, qui trois années auparavant ne parlait aucun mot de français, obtiendra son CAP de mécanique, puis le brevet industriel.

Il va ensuite très vite se propulser dans l’électronique, la voie de l’avenir, en se spécialisant dans la maintenance de tout ce qui touche à cette industrie qui connaitra son plein essor, avec l’apparition de la puce électronique qui aujourd’hui gère nos sociétés.

Georges Petroff se prévaut d’être autodidacte d’une vaste culture, qu’il doit à sa passion pour l’histoire des objets anciens, et qui plus qu’un hobby, deviendra son nouveau métier. Il s’oriente vers le négoce des monnaies, timbres, cartes postales, décorations, livres, tableaux, documents…Il en devient l’un des experts reconnu pour en déterminer la nature, l’origine et pour en estimer la valeur. Il fréquente Drouot et les principaux lieux où s’échangent ces témoignages de ce que furent nos sociétés, aussi loin que l’on puisse remonter dans le temps, avouant toutefois s’attacher à certains objets et à ne s’en séparer que difficilement.

En 1962 il a 28 ans, c’est son ami Charles Renucci qui lui fera découvrir Pietra di Verde et la Corse. Le début d’une histoire d’amour qui ne s’éteindra jamais. Il acquerra en 1989 un séchoir à châtaignes en face de l’ancienne poste qu’il transformera en une charmante demeure où il réside depuis lors régulièrement avec son neveu Freddo, le fils de sa jeune sœur Olga. Olga  aujourd’hui disparue, dont la génération des adolescents des années 60 se souvient avec beaucoup d’émotion, ayant conservé le souvenir d’une gentille camarade, sympathique et chaleureuse.

Et lorsque l’on demande à Georges Petroff s’il se sent plus russe, letton, niçois ou piétrolais, il fait cette réponse spontanée, « je me sens être humain ».

Comment aurait-il pu en être autrement, alors que toute l’histoire de son combat pour la vie lui a enseigné de faire prévaloir l’humain sur toute autre considération d’appartenance géographique, ethnique ou religieuse ?

Comment aurait-il pu en être autrement pour celui qui connut enfant l’exode, la fuite, les camps puis l’exil, pour celui qui aura eu ensuite sa vie durant comme seule valeur cardinale le travail, source de dignité.

Une belle réponse qui doit nous interpeller et une grande satisfaction que celle de savoir, qu’un homme d’une telle noblesse de cœur et d’esprit, fait partie de notre communauté villageoise, Georges Petroff,  humaniste jusqu’à l’infini.

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